Un vieux livre,
Flétri et tout ridé
Un livre tout fraîchement arrivé,
Aux ailes pas encore déployées…
L’un ignoré et un jour,
Tel l’enfant prodigue,
Retrouvé.
Ou bien exténué de trop de demandes,
Aspirant au silence des
Oubliés…
Livre – mon ami.

Pierre-Henri SIMON
Ce que je crois
Grasset – 1966

Oui… plus d’un demi-siècle après, par je ne sais quel hasard, mon regard a redonné vie à cet essai de Pierre-Henri Simon.
Et le voici sur ma table… et je tends l’oreille…

« Dans la pièce où j’aime à lire, à travailler, à réfléchir et à écouter de la musique, trois images suspendues aux murs, éclairent ma navigation.

L’une est. la reproduction de l’Erasme d’Holbein : l’homme assis, enveloppé de sa houppelande sombre, le front protégé par la visière de son bonnet rond, écrit, confortablement séparé des offenses de la nature, sa belle main blanche suspendue sur le papier où l’on sent que les mots s’alignent lentement, inspirés par l’intelligence qui les choisit et les gouverne…
L’humanisme est là, dans ses dimensions supérieures et strictes de science et de pensée…

La seconde image est une représentation du clown triste du Miserere de Rouault. Aucune face n’a jamais plus parfaitement reflété la rencontre de la détresse et la tendresse…

La troisième image reproduit le cintre d’un portail d’église que je connais depuis mon enfance. Assez indifférente aujourd’hui, la Saintonge, vieille province romaine, a dû être pieuse au lointain douzième siècle où ont surgi de partout ces façades et ces absides romanes qui resplendissent encore aujourd’hui en des bourgs moribonds et des clairières forestières…

Pierre-Henri Simon (1903-1971) fut un intellectuel engagé, historien de la littérature, essayiste, romancier, poète et critique littéraire français. Élu à l’Académie française le 10 novembre 1966, il est reçu sous la Coupole le 9 novembre 1967.

Hans Holbein (1497-1543) obtint une réputation internationale en 1523 avec ses trois portraits d’Erasme (ill. Musée du Louvre)

Georges Rouault (1871-1958), peintre et graveur français, allie à la ferveur religieuse des idées sociales libertaires. Il entreprend dès 1917 les gravures sur cuivre du Miserere, à partir de dessins exécutés à l’encre de Chine.